Le budget 2025, censuré en novembre et entrainant la démission du gouvernement Barnier, est revenu tel quel, comme si de rien n’était quelques semaines plus tard avec le gouvernement Bayrou.
Au-delà du déni démocratique qui se poursuit depuis juin et la dissolution, ce budget est marqué du sceau de l’austérité. Plus de 23 milliards de coupes budgétaires ont été opérées. Nous ne sommes pas si loin de la tronçonneuse de Mileï en Argentine.
Dans cette chasse à la dépense publique, de nombreux secteurs sont touchés, dont la culture, et plus précisément, le Pass Culture.
Promis et promu par Emmanuel Macron, ce dispositif était censé démocratiser la culture et profiter aux jeunes de 15 à 18 ans.
Le bilan réalisé par la Cour des Comptes en décembre 2024 est assez critique. Le Pass Culture n’a pas réellement atteint ni ses objectifs et ni sa cible.
Ainsi, 25 % des jeunes n’ont pas bénéficié des 300 euros qui leur sont attribués pour accéder aux activités ou biens culturels de leur choix. Seuls 68 % des jeunes issus des classes populaires ont activé leur passe, contre près de 81 % des jeunes des classes supérieures.
La culture apparait encore trop souvent un domaine réservé à une certaine élite.
La reproduction sociale est un mécanisme complexe et un lourd héritage dont il est difficile de se défaire, surtout si l’Etat ne se donne pas les moyens de lutter contre les inégalités liées au capital culturel.
Par ailleurs, on peut s’interroger sur la pertinence de ce Pass considérant que ce sont les grandes enseignes culturelles ou des complexes cinématographiques qui captent l’essentiel des parts des marché au détriment par exemple des librairies indépendantes ou des cinémas d’art et d’essai.
Ces constats critiques qui pourraient être l’occasion de réorienter le dispositif pour le déployer dans une autre direction, ne sont pas pris en compte par le gouvernement. Au contraire, il fait le choix d’amputer la part ‘’collective’’ du Pass culture, c’est-à-dire celle qui concerne l’action culturelle menée par les collèges et les lycées au profit des élèves.
D’un montant de 97 M€ en 2024, l’enveloppe a été abaissée à 72 M€, de façon brutale et unilatérale. Ce coup de rabot est un coup porté aux activités culturelles, aux sorties scolaires au théâtre, au musée, au cinéma.
Cette somme est divisée en deux temps, 50 M€ pour la période de janvier à juin et 22 M€ pour septembre à décembre. Or, 40 millions d’euros ont été déjà utilisés pour l’année scolaire 2024-2025. En conséquence, pour la prochaine rentrée, il ne reste que 10 millions à se partager entre tous les établissements scolaires de France…
Cette situation va entrainer une concurrence entre les établissements et va à l’évidence pénaliser nombre d’élèves qui ne vont pas pouvoir bénéficier de projets.
Dans de nombreux territoires, les jeunes sont éloignés de la culture, et bien souvent l’école avec l’implication de professeurs joue ce rôle de démocratisation, et permet à des jeunes de rencontrer des artistes, d’aller pour la première fois dans des structures culturelles, de leur donner le gout ensuite d’y retourner, de se sentir autorisés à y aller, sans s’auto-censurer.
Ces dernières semaines, du fait des baisses de dotations, de nombreuses collectivités ont fait le choix de sacrifier aussi la culture, en baissant les budgets. De nombreux artistes parlent même d’un plan de licenciement massif.
Le droit et l’accès à la culture sont essentiels et doivent être garantis dans une démocratie. La culture permet l’émancipation, la réflexion critique, la curiosité et la découverte, elle permet de bousculer les idées reçues, autant d’atouts primordiaux en ces temps où les idées de haine, de division sont légion.
Les autres victimes collatérales de cette diminution du Pass Culture sont les intermittents qui vont, de fait, avoir moins d’interventions ou de missions. Alors que les réformes successives ont durci les conditions pour bénéficier de ce régime, précarisant encore plus un peu tous les professionnels de ce secteur ils vont donc subir une nouvelle attaque et une nouvelle mise en danger.
Mais la ‘’bonne nouvelle’’ dans toute cette histoire et dans ce pays de fous, c’est que le Puy du Fou, à la demande du Rassemblement National, va être éligible au Pass Culture… Décidément, ce monde va mal.