Génération Z, moteur du changement ?

10 Oct 2025

On les nomme par une lettre, la dernière de l’alphabet. Mais ils sont un puissant réservoir d’espoir. C’est la génération Z qui entre en action aux quatre coins du globe.

Les mobilisations de ces dernières semaines en Asie et en Afrique, dans les continents les plus jeunes de la planète, ont fait les titres de l’actualité. Par milliers, des jeunes ont ébranlé des pouvoirs et envahi les rues des grands centres urbains. Ce sont parfois des gouvernements qui ont été renversés. L’action des réseaux sociaux a été déterminante pour relayer leurs combats. La génération Z, née après 2000, est la première génération aussi connectée et qui a été socialisée dès le plus jeune âge aux modes de communication numérique. C’est fort logiquement qu’elle utilise ces outils à sa disposition pour s’exprimer et se mobiliser.

Comme souvent, c’est un événement qui a déclenché la colère sociale et provoqué la révolte. Au Maroc, ce sont des morts de nourrissons dans les hôpitaux publics, faute de moyens. Au Népal, c’est la coupure d’Internet par un pouvoir aux abois qui a voulu étouffer des scandales de corruption. En Indonésie, c’est l’arrestation de jeunes militants par un pouvoir autocratique.

Partout, une jeunesse diplômée émerge et cherche des débouchés. Quoi qu’on pense des systèmes politiques à Madagascar, au Maroc, en Indonésie, au Bengladesh, des cohortes de jeunes diplômés sortent chaque année de l’enseignement supérieur, certains ayant fait une partie de leurs études à l’étranger. Ils sont connectés et voient le développement économique, envisagent d’exercer des métiers qualifiés. Mais les économies dans lesquelles ils vivent ne peuvent absorber ces générations et créent une précarité grandissante, à côté d’une autre jeunesse qui n’est pas qualifiée. Partout, le capitalisme dérégulé ne répond pas aux aspirations des populations.

A chaque fois, c’est l’impression d’être étouffé et de n’avoir aucune perspective qui sont les ferments des contestations.

Les exigences de liberté et de services publics, d’emploi correctement rémunéré fleurissent. Ce sont des demandes de bien commun, de progrès social qui émergent.

Les éléments de culture populaire sont brandis en étendard et l’humour est parfois utilisé pour porter un pouvoir, lui souvent déconnecté des aspirations, en dérision.

Mais la lucidité impose de voir la complexité de ces mouvements.

Si les révoltes sont impulsées par les jeunes, la colère sociale s’étend en général aux autres catégories de la population. Les parents de ces jeunes sont par exemple présents dans les manifestations car les revendications portent sur l’accès aux services publics et se cristallisent sur les projets d’accueil des compétitions sportives (CAN et Coupe du Monde de football) qui vampirisent les budgets et exproprient des habitants des grandes villes. Nous sommes donc loin du cliché d’une révolte seulement partie sur les réseaux sociaux et menée uniquement par la jeunesse. La grille d’analyse est encore une fois plus complexe que celle qu’on avait déjà posé sur les « printemps arabes » au début des années 2010.

C’est tout d’abord le manque d’organisation qui est criant. Il est en effet à craindre que ces révoltes soient des mouvements sans lendemain. La répression reste une réalité et empêche un début de structuration. Les pouvoirs autoritaires peuvent ainsi plus facilement lancer les forces policières pour étouffer les actions. Il faut aussi rappeler qu’être hyperconnecté ne protège pas des risques d’instrumentalisation. Les réseaux sociaux, aux mains des GAFAM ou des Etats autoritaires, sont loin d’être neutres. Nous avons vu en Europe à quel point une fausse information pouvait être massivement diffusée et légitimer des actions comme l’ont prouvé les émeutes racistes en Espagne ou les manifestations xénophobes au Royaume-Uni.

Mais la répression ne peut éteindre une lame de fond. La génération Z est multiple et variée, traversée par les configurations sociales diverses, les contradictions de classe et les niveaux de développement. Il faudra répondre à sa soif de justice sociale, à ses aspirations démocratiques. Ce sont peut-être dans les pays où les situations sont les plus favorables que des mouvements organisés pourraient émerger et se structurer. 

N’oublions pas en effet qu’une partie de la jeunesse est sans débouché ou empêtrée dans des sociétés meurtries par les guerres, les systèmes politiques verrouillés ou encore subit les effets déjà puissants du dérèglement climatique. Pensons à ces jeunesses du Moyen-Orient, de la bande sahélienne en grande souffrance et qui n’ont que l’exil ou les armes comme choix immédiats.

Plus que de simples slogans sans lendemains, l’espoir de mobilisation et de révolte de la génération Z doit s’amplifier par la mise en réseau et l’organisation. 

L’espoir que la demande de bien commun y devienne majoritaire nous réjouit et nous oblige à l’action. Le plus dur est devant nous.

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