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Énergie, ce bien commun

Fabien GAY

29 sept. 2022

A la crise énergétique majeure qui nous frappe et qui va s’aggraver, le gouvernement a décidé d’opposer le prolongement de deux mesures temporaires l’an prochain. Les chèques énergie, d’une valeur de 100 à 200 euros selon les revenus, seront étendus aux 12 millions de foyers les plus modestes, et le bouclier tarifaire permettra de contenir la hausse des prix à 15% au lieu de 120%.

Le choix des mots est important ; il révèle quelque chose des représentations qui les sous-tendent. Les mesures décidées par le gouvernement vont coûter 16 milliards d’euros à l’Etat… c’est-à-dire à nous, et c’est-à-dire qu’on nous demandera, tôt ou tard, d’en payer le prix. Ensuite, qu’est-ce qu’un bouclier ? Une pièce d’attirail défensif pour se protéger des coups des ennemis. Nous voilà dans une attitude défensive, donc ; mais ici, de qui se défend-on ? Ne peut-on rien contre ces ennemis qui sont à la racine du problème ? Car la guerre en Ukraine n’explique pas tout. Puisque le choix des mots est important, commençons par nommer ces ennemis : la libéralisation du secteur de l’énergie et le marché européen qui en découle.


Or les mesures annoncées par le gouvernement, tout comme les déclarations de la Commission européenne reconnaissant que le marché européen de l’énergie n’est pas adapté, resteront largement insuffisantes.

Pour les Français·es, dont 12 millions sont en situation de précarité énergétique, alors que l’inflation touche tous les secteurs, notamment l’alimentation, et que les fins de mois sont de plus en plus difficiles à boucler.


Pour les entreprises, dont certaines prévoient un ralentissement ou une interruption de leurs activités. Ainsi, Duralex, très consommatrice de gaz et d’électricité, a annoncé quatre mois de fermeture à partir de novembre et un recours au chômage partiel pour ses 250 employés. Et la liste ne cesse de s’allonger : l’aciérie LME, ArcelorMittal, Arc France, etc.

Elles seront insuffisantes pour les collectivités, dont les coûts augmentent mais dont les dotations stagnent. Fournitures, denrées alimentaires pour les cantines, réévaluation du point d’indice des fonctionnaires et hausse des tarifs de l’énergie : la situation devient intenable. C’est pour cette raison que vingt-trois maires communistes ont lancé un appel au gouvernement le 14 septembre, demandant notamment l’accès aux tarifs régulés de l’électricité pour les collectivités territoriales.


Surtout, ces maires insistent sur la nécessité de considérer l’énergie comme un bien essentiel. Car au même titre que l’eau, l’énergie est nécessaire pour vivre, pour manger, se chauffer, se laver, travailler. Le choix des mots est important : l’énergie est un bien essentiel, elle est même un bien commun. Elle doit donc être accessible à toutes et à tous, tant en termes de répartition territoriale que de porte-monnaie. Le marché européen de l’énergie, artificiellement créé et qui conduit à la spéculation sur le dos des opérateurs public sans encourager la production, ne peut pas le garantir ; seul le service public le peut. Découpler les tarifs de l’électricité de ceux du gaz, une piste envisagée par l’UE, est un pas mais là encore, insuffisant puisque l’énergie reste pensée dans le cadre du marché, donc de la course aux profits… donc au détriment des usagers.


La ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, indiquait récemment que « chaque geste compte » ; un relent de la campagne d’EDF qui enjoignait à « mettre un pull ». Oui, chaque geste compte. Mais ce sont toujours aux mêmes qu’on les demande. Nous ne demandons pas un geste de la part de l’Etat, mais bien un autre chemin politique. Il est temps d’agir !

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