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Logement : la loi du marché ne sera jamais efficace

C’est un nouveau rendez-vous manqué pour le gouvernement. Il est malheureusement lourd de conséquences pour beaucoup de nos concitoyens et d’acteurs économiques.


Annonçant en grande pompe des mesures de relance pour le logement, Elisabeth Borne a finalement dévoilé un plan peu ambitieux. Le secteur du logement souffre bien avant la crise inflationniste d’un manque de construction consécutif à des choix hasardeux qui avaient littéralement affaibli le secteur du logement social dans le précédent mandat et en conséquence l’ensemble du secteur de la construction.


Porté dans le cadre du conseil national de la refondation, le projet gouvernemental continue dans la ligne libérale, inefficace et injuste. Même si la fin du dispositif Pinel est une bonne nouvelle puisqu’elle favorisait les logiques de financiarisation au profit des grands propriétaires, cela place des petits investisseurs dans l’incertitude qui y voyaient un supplément de pouvoir d’achat.


La hausse des taux d’intérêt profitant à ces mêmes grands financiers, la construction n’est pas enrayée par les annonces. Or, c’est bien avant tout par la relance du logement social que le secteur pourra se développer ! Ce sont pourtant 2,4 millions de personnes qui sont en attente de logement social.


Le gouvernement préfère continuer la casse du logement social. Durement touchés par les hausses de loyer, les locataires du parc social vont devoir payer plein pot la garantie Visale quand les bailleurs sociaux ne sont pas aidés par la fin du dispositif Pinel qui ne sera finalement qu’une mesure d’économie budgétaire.


Les locataires du parc privé ne sont pas épargnés puisque les locations meublées touristiques ne sont toujours pas régulées malgré l’action et la demande d’élus locaux non seulement dans les métropoles mais également dans les zones littorales. Ce sont les salariés des couches populaires et moyennes qui sont pénalisés et laissés à l’abandon surtout que l’encadrement des loyers n’est toujours pas à l’ordre du jour. Le marché continue de faire la loi avec un parc toujours aux mains de grands propriétaires : 3,5% des multi-propriétaires possèdent ainsi 68% du parc privé ! Beaucoup de ces locataires sont des personnes mal-logées dans des situations de souffrance, soit dans un habitant mal entretenu pour des raisons d’économies soit par des marchands de sommeil qui profitent des situations de désespoir pour exploiter la misère humaine ou des situations difficiles.


Dans un climat social difficile pour beaucoup, le mal logement risque de progresser avec la fragilisation des locataires, aggravant les risques d’expulsion. Les annonces pour lutter contre le sans-abrisme sont ainsi hypocrites. Il faut d’abord éviter les parcours brisés et couper les chemins qui mènent à la rue (le nombre de SDF est en inquiétante progression), ce qui implique de cesser les expulsions et d’accompagner les personnes en grande fragilité par un travail d’insertion par l’emploi, la formation pour leur permettre de retrouver goût à la vie.


La logique de bail réel solidaire est louable mais il faut agir sur les prix du mètre carrés et ne pas miser sur la seule accession à la propriété comme réponse aux besoins de logement.

Le foncier public sera enfin bradé pour des constructions sans objectif social ni environnemental à l’heure où l’enjeu de la question de la construction durable, sociale, dense se pose pour répondre aux enjeux divers. Car le logement est partie intégrante d’une réflexion globale sur l’aménagement du territoire, la relation entre le lieu d’habitation et le lieu de travail, l’objectif de zéro artificialisation des sols, la rénovation thermique des logements existants.


Encore une fois, le gouvernement n’est pas à la hauteur et continue de segmenter les problèmes sans voir que le logement est primordial dans le parcours de vie pour accéder à un travail, vivre dignement et se projeter. C’est un secteur qui mobilise un vivier d’emplois directs et indirects.


Dans mon territoire de Seine-Saint-Denis où les demandeurs de logement social doivent parfois attendre jusqu’à dix ans pour obtenir un logement social, où le coût du mètre carré augmente sous l’effet de la métropolisation, c’est un message de renoncement qui est renvoyé à ces milliers de personnes. En renforçant les mêmes logiques inefficaces depuis des décennies, on oppose des classes populaires et moyennes entre elles, des salariés modestes à des très pauvres voire en situation de détresse sociale.


Il aurait fallu du courage et de l’écoute pour entendre les revendications des professionnels du secteur immobilier, les associations de défense du logement et des locataires, les structures de solidarité.


Pour répondre aux besoins immédiats, il n’est pas trop tard pour geler immédiatement les loyers, interdire les expulsions locatives comme cela a été fait durant la période Covid. Il faut revaloriser les APL et donner de l’oxygène au secteur de l’habitat social (en ponctionnant sur les économies faites sur la loi Pinel ou par une TVA à 5,5% sur la construction) pour impulser une dynamique de production de logements et d’investissement (rénovation thermique notamment) dans le parc existant.


Un peu plus de courage nécessiterait enfin de taxer les plus-values immobilières, les résidences secondaires, une réelle régulation des meublés touristiques avec sanctions et enfin le respect de la loi SRU pour que le logement social, qui n’est pas une tare ou un stigmate, puisse être réellement au service de l’égalité sociale.




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