Réforme de l’audiovisuel : un danger pour notre démocratie

2 Juil 2025

Après des mois de mobilisation des salariés face à une réforme que le gouvernement n’arrivait pas à caser dans son calendrier, la proposition de loi sur l’audiovisuel public a été rejetée à l’Assemblée Nationale.

Rejetée est un bien grand mot, puisqu’une nouvelle fois, en réalité, cela a surtout permis à la Ministre de la Culture d’éviter le débat parlementaire, de sauter la case du Palais Bourbon pour aller directement au Palais du Luxembourg, où la droite est majoritaire et a même été à l’initiative de cette proposition.

Cette réforme est dans les cartons de Rachida Dati depuis sa nomination rue de Valois. Et l’audiovisuel français est dans le viseur de la Macronie et plus largement depuis des années. 

Les aléas de la vie politique et notamment la dissolution de l’an dernier, ont quelque peu freiné les ambitions de Rachida Dati, tant sur le calendrier d’adoption que sur le contenu. Rappelons qu’à l’origine, était envisagée la fusion de la radio et de la télévision publique. Face à l’opposition, il a fallu reculer. Ou plus exactement donner l’illusion d’un recul. Car en réalité, la création d’une holding ‘’ France Médias’’ au sein de laquelle seraient regroupées France Télévisions, Radio France et l’Institut National de l’Audiovisuel, représente le même danger et les mêmes menaces, avec toutes les caractéristiques d’un prélude à une fusion.

Et cette réforme, bien loin de renforcer l’audiovisuel public, va l’affaiblir, comme l’avait déjà affaibli, le privant de moyens, la suppression de la redevance. Depuis 2017, par les différentes baisses de budget, les médias publics ont perdu 776 millions d’euros.. et d’après une note de Bercy, cette réforme est conçue pour faire des économies dans le cadre du budget 2026.  

Des émissions sont arrêtées faute de budget, des antennes locales disparaissent alors qu’elles font vivre la proximité et sont des relais essentiels d’information. 

A l’heure où le RN est proche des portes du pouvoir et fait de la privatisation de l’audiovisuel, l’un des points de son programme, il y a des raisons d’être inquiets quant à la suite. 

La Ministre de la Culture, avec les éléments de langage propres aux libéraux, entend évidemment, ‘’rebooster’’ ce secteur pour faire face à  la concurrence des plateformes et des géants du numérique. Comme sur d’autres sujets, sous couvert de modernisation, le gouvernement veut détruire ce qui fonctionne dans le public pour l’offrir, tôt au tard, au privé ! 

En mutualisant des métiers qui sont certes proches mais qui n’ont rien à voir, on fragilise des savoirs faire, des métiers ! C’est prendre le risque de créer une usine à gaz dont on n’aura plus qu’à dénoncer l’inefficacité dans quelques années.

De plus, cette réforme confie tous les pouvoirs de l’audiovisuel, entre les mains d’un seul PDG, ce qui n’est jamais bon signe.

Ce qui est en jeu, c’est l’existence, le fonctionnement et le rôle de de l’un de nos piliers de la démocratie. Pour certains, radios, chaines de télévision et Ina, ne peuvent plus appartenir au public, ne peuvent plus être de fait indépendantes des puissances de l’argent. 

L’heure est à la mise au pas, l’heure est à la privatisation sous la coupe de milliardaires. Le paysage médiatique est déjà considérablement concentré et composé de quelques conglomérats qui règnent sur tout. Tout ou presque appartient à Bolloré, Bouygues, Saadé, ou Drahi. Sans parler de la presse écrite. Tous ont en commun d’être milliardaires, d’être des business men qui n’en ont rien à faire de l’information ou de la presse. Le but est de posséder des titres, d’acheter des chaines, de faire un mercato entre soi pour surtout faire de l’influence idéologique et servir les intérêts du capital. 

Dans le contexte actuel, seul le service public peut être le garant d’une information fiable, sourcée et de qualité. Souhaitons-nous vivre à l’heure des fake news, de la désinformation permanente ou souhaitons-nous pouvoir conserver un pluralisme et une confiance dans l’information ? 

Journalistes, techniciens, producteurs, personnels administratifs, pigistes, intermittents ont raison de se mobiliser et de se méfier de cette Ministre de la culture qui enchaine les attaques contre les journaux qui osent la critiquer et dénoncer certaines affaires. A l’heure où les procédures baillons se multiplient contre les journalistes, c’est une question cruciale pour notre démocratie, tant les journalistes, les vrais, sont un rempart contre l’extrême droite. 

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