Shein, la grande braderie… des droits

6 Oct 2025

La marque Shein vient d’annoncer l’ouverture de plusieurs magasins en France dont le célèbre BHV à Paris et des enseignes Galeries Lafayette.

Cette décision illustre, si cela était encore nécessaire, de l’intérêt grandissant de la clientèle pour ce leader made in China. Mais le succès de cette plateforme en ligne, interroge et inquiète légitimement, comme un emblème de tous les maux contemporains. Des élus s’opposent déjà à cette arrivée. 

Avec des tee-shirts à 2 € ou des jupes à 3 €, Shein est devenu le symbole de l’ultra fast-fashion, avec des prix tuant la concurrence. Avec des pratiques commerciales dites agressives, et parfois trompeuses, la marque bien aidée par des algorithmes et l’intelligence artificielle, rend captive voire addicte une partie de sa clientèle. Celle-ci est majoritairement très jeune, avec un pouvoir d’achat faible, et en grande demande vestimentaire en fonction de l’évolution des dernières tendances, véhiculées sur les réseaux sociaux des influenceuses. 

Sans juger ni paraitre moralisateur ou culpabilisateur, il est tout de même nécessaire de se questionner sur la conquête du monde par ce groupe du monde du textile, en quelques années. L’industrie textile a largement disparu du territoire national au cours des dernières années laissant la place à d’autres acteurs moins soucieux. 

Cette conquête tient en quelques mots : non-respect des droits. En matière sociale et environnementale et en matière de droits humains.  

Plusieurs médias ont alerté notamment sur les conditions de travail des salariés de la marque ou de ses nombreux sous-traitants. On le sait, bien souvent le dumping social et l’exploitation des travailleurs sont l’apanage du capitalisme et des groupes peu vertueux, pour qui la rentabilité financière est la seule préoccupation. La population Ouïghour, dont on connait le sort qui lui est réservé par les autorités chinoises, est une cible de la marque pour exécuter ce qu’il convient d’appeler du travail forcé. 

Pour permettre son expansion mondiale et sa croissance vertigineuse, Shein réduit à néant les droits d’hommes et de femmes, esclaves de ce système.

Il faut également dénoncer l’impact environnemental très négatif de cette marque. Là encore, à vouloir réduire les coûts pour augmenter les marges, la qualité des produits n’est évidemment pas la priorité. La plupart est en polyester, l’une des fibres textiles les moins chères du marché et la plus produite aujourd’hui. Ce textile synthétique représente à lui seul 14% de la production mondiale de plastique. Et qui peut ignorer aujourd’hui les ravages du plastique et la nécessité de limiter son utilisation à l’échelle planétaire, notamment pour préserver les fonds marins, la faune et la flore ? 

Shein habille les femmes et les hommes mais détruit la planète. 

A ceci s’ajoutent des substances chimiques toxiques, qui ne respectent pas les seuils européens et sont des perturbateurs endocriniens aux conséquences sanitaires prononcées.

Enfin, le succès de Shein repose sur une consommation de masse et des livraisons express aux quatre coins de la planète, dans un monde où tout va de plus en plus vite, où l’immédiateté règne. Et pour satisfaire ces principes, Shein dénigre le transport maritime La firme livre 5 tonnes de marchandises par voie aérienne chaque jour depuis la Chine. Le but : aller vite, pour satisfaire un client que l’on a habitué à ne plus patienter et qui peut recevoir chez lui dès le lendemain ou presque un produit fabriqué à l’autre bout du monde. 

Ainsi, les émissions de gaz à effet de serre du groupe ont été multipliés par deux en trois ans, détrônant sans gloire ses principaux concurrents, et faisant de lui, la marque de vêtements qui – du point de vue des émissions carbone – pollue le plus aujourd’hui. 

Un joli palmarès qui semble finalement contrarier la marque et qui a recruté l’ancien ministre de l’intérieur Christophe Castaner pour voler au secours de son image et assurer le service après-vente ! Le lobby a été particulièrement intense pour s’opposer à la proposition de loi anti-fast fashion. Adoptée à l’Assemblée Nationale et au Sénat en 1ère lecture, cette loi est toujours en cours de navette parlementaire, faute, une nouvelle fois, de gouvernement. La crise politique dans laquelle est plongée le pays va peut-être mettre cette loi aux oubliettes, pour la plus grande joie des lobbys..

La tâche est quoi qu’il en soit immense car Shein est l’enseigne de mode où les Français et les Françaises ont le plus dépensé en 2024. Si un travail de sensibilisation est indispensable pour faire connaitre ce qui se cache derrière cette marque, la question du pouvoir d’achat n’est pas secondaire.. l’appauvrissement général dans notre pays, où les citoyens et citoyennes n’ont plus les moyens de se loger, de se nourrir correctement, de se chauffer mais également de s’habiller, est un sujet majeur pour savoir dans quelle société nous voulons vivre. 

Shein, comme d’autres, est un symbole d’une mondialisation qui écrase tout. Par ses volumes et son imbrication dans un commerce numérisé qui tue aussi les boutiques de proximité. On ne pourra déplorer la fin des cœurs de ville, des petites zones commerciales si on laisse ce genre de marques vampiriser tout le système d’échanges.

Surproduction, surconsommation, pollution et exploitation, Shein concentre tous les éléments des ravages du capitalisme. Il est temps de prôner un autre modèle. D’une mode jetable passons à une mode durable et recyclable et durable ! 

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